Un objet unique, témoin d’une histoire juive presque oubliée de Gaza, va bientôt être remis au président américain Donald Trump. Il s’agit d’un exemplaire du “Choulhan Aroukh” datant de 1876, retrouvé dans la bande de Gaza et portant l’inscription rarissime : « Reroush ha-kehila ha-yehoudite ha-kedosha de-Aza » — « Propriété de la sainte communauté juive de Gaza ».
Source : https://www.makorrishon.co.il
Le rabbin Shlomo Ra’anan, figure du monde associatif religieux et lauréat de la Médaille présidentielle du volontariat, a confirmé à l’AFP son intention d’offrir ce volume historique au président Trump, en signe de gratitude pour son rôle déterminant dans la libération des 20 derniers otages vivants encore détenus dans la bande de Gaza.
Un livre venu d’un autre temps, retrouvé dans les ruines
L’ouvrage, imprimé en Lituanie en 1876, a refait surface dans des circonstances dignes d’un récit historique : il a été découvert à Gaza par un ouvrier palestinien travaillant en Israël avant la guerre, puis transmis à son employeur israélien.
Ra’anan raconte qu’il a entendu parler du livre dès les premières semaines du conflit déclenché le 7 octobre 2023 :
« Le marchand d’antiquités m’a parlé d’un volume provenant d’une ancienne communauté juive de Gaza. J’en suis tombé amoureux avant même de l’avoir vu. »
Ce n’est qu’après l’avoir acquis qu’il comprend la valeur unique de cet objet. Sur la page intérieure figurent trois inscriptions, chacune dans une langue différente :
- En hébreu : « רכוש הקהילה היהודית הקדושה של עזה » — Propriété de la sainte communauté juive de Gaza.
- En arabe : « האגודה היהודית של עזה ».
- En français : « La communauté juive de Gaza, Palestine ».
Un témoignage historique exceptionnel, surtout aujourd’hui, alors que la présence juive à Gaza appartient à un passé balayé par les expulsions successives et par un siècle de conflits.
Une présence juive ancienne dans une ville plusieurs fois détruite
L’article rappelle que des Juifs ont vécu à Gaza pendant des siècles, sous des dominations successives : les califats musulmans, les croisades, l’Empire ottoman, Napoléon, puis le Mandat britannique.
La petite communauté, parfois florissante, parfois chassée, finit par disparaître en 1929, après les pogroms de la période des émeutes de Hébron et de Gaza. Les derniers Juifs quittent alors une ville qui avait connu, au XVIIᵉ siècle, l’un de ses rabbins les plus célèbres : Rabbi Israël Najara, auteur du célèbre piyout « Yah Ribbon Olam », chanté aujourd’hui encore sur d’innombrables tables de Shabbat.
Pour Ra’anan, tenir ce livre entre ses mains, « c’est toucher une partie de notre peuple, de ceux qui ont vécu ici bien avant que Gaza ne devienne le symbole d’un conflit sans fin ».
Un cadeau « signé par les otages libérés »
Le rabbin affirme vouloir remettre le livre personnellement à Donald Trump, dès qu’une rencontre sera organisée.
« Je veux lui donner ce livre, signé par les otages libérés, avec des mots de remerciement », déclare-t-il.
Selon lui, ce geste symbolise à la fois la reconnaissance envers Trump — président en exercice depuis janvier 2025 — et le lien indestructible entre le peuple juif et son histoire, même dans les lieux les plus inattendus.
Pour Ra’anan, l’objet représente plus qu’une relique :
« Le livre crée un lien avec la communauté juive qui vivait autrefois à Gaza, à un moment où beaucoup d’otages étaient encore retenus dans la même région. Son étude m’a donné foi et espoir. »
Un symbole d’espoir au milieu du combat pour les otages
Il y a deux ans, Ra’anan a installé une tente permanente sur la place des Otages à Tel-Aviv. Il y organise désormais des prières, des rencontres et des activités pour accompagner les familles plongées dans une attente insupportable.
Il raconte les moments les plus difficiles :
« Certains parents me demandaient : “Pourquoi se lever demain matin ? Où trouver la force ?” »
Et il montre à l’AFP un passage du livre consacré au pidyon shvouyim — la libération des captifs, considérée comme une mitzvah suprême dans la loi juive.
« Regardez ce passage : ‘Il n’y a pas de commandement plus grand que de libérer des captifs.’ Toute la question morale — peut-on risquer la vie de soldats pour sauver d’autres vies ? — a été notre débat pendant deux ans. »
Pour lui, ce livre est un phare spirituel dans une période de déchirement national.
Un message clair : “Am Israël Lo Yéalam” — Le peuple juif ne disparaîtra jamais
À travers le livre et à travers le geste symbolique envers Trump, Ra’anan veut transmettre un message :
« Le peuple juif ne disparaîtra pas. »
Un message universel, mais aussi intime : celui qu’il porte aux familles des otages depuis plus de deux ans.
En offrant ce volume — survivant aux destructions successives, aux combats récents, et au chaos de Gaza — le rabbin souligne la continuité du peuple juif, malgré les tempêtes et malgré les tentatives répétées d’effacer son héritage.
Le livre, vieux de près de 150 ans, devient ainsi un pont : entre Gaza et Israël, entre passé et présent, entre les otages retrouvés et ceux qui ne reviendront peut-être jamais.






