Scène improbable mais bien réelle : des membres du Hamas ont été autorisés, sous strict encadrement, à pénétrer dans la “zone jaune” du sud de la bande de Gaza, contrôlée par Tsahal, afin d’aider le Croissant-Rouge et des équipes égyptiennes à localiser les corps d’otages israéliens présumés morts. Cette mesure exceptionnelle, confirmée par des sources militaires citées par Ynet et Reuters, illustre la complexité humanitaire et politique du conflit : même les ennemis irréductibles se croisent désormais autour des décombres.
L’autorisation, accordée dimanche matin « avec validation sécuritaire au plus haut niveau », selon le Jerusalem Post, vise à faciliter les fouilles dans plusieurs secteurs du corridor de Khan Younès. Tsahal soupçonne que plusieurs dépouilles d’otages israéliens assassinés lors des premiers jours de guerre y sont ensevelies, près d’anciennes infrastructures du Hamas.
Un dispositif humanitaire sous surveillance militaire
Les recherches sont menées conjointement par le Croissant-Rouge égyptien, des équipes israéliennes du génie militaire et des observateurs du Comité international de la Croix-Rouge (CICR). Pour la première fois, des « représentants locaux du Hamas » — non armés et sélectionnés par la partie égyptienne — ont été admis sur le site, afin d’indiquer l’emplacement supposé de certaines fosses.
L’armée israélienne a précisé que ces individus « ne disposent d’aucune immunité » et qu’ils sont « constamment encadrés par des soldats de Tsahal et des caméras de surveillance ».
Selon Kan News, cette mesure a été prise après des jours de négociations menées via Le Caire et Doha. Le ministre israélien de la Défense Israël Katz a personnellement donné son feu vert « dans l’unique but de ramener les corps de nos otages et de permettre une identification rapide ».
Une collaboration paradoxale
Cette coordination, inimaginable quelques mois plus tôt, souligne l’évolution du terrain à Gaza.
Pour Israël, il ne s’agit pas d’un dialogue mais d’une logistique de nécessité : les anciens cadres du Hamas connaissent les zones d’enfouissement, souvent creusées sous des tunnels effondrés. Sans leur aide, certaines fouilles seraient impossibles.
Un officier israélien confie :
« Ce n’est pas une coopération politique. C’est une opération humanitaire encadrée par les fusils de Tsahal. Aucun contact direct n’est autorisé, seulement des instructions transmises via les médiateurs égyptiens. »
Du côté du Hamas, cette participation sert de vitrine médiatique. Dans un communiqué relayé par Al-Jazeera Arabic, le mouvement affirme qu’il “agit par devoir humanitaire pour rendre les corps”, une formulation jugée cynique à Jérusalem. Un porte-parole israélien a rétorqué : « Ceux qui ont assassiné des civils n’ont pas soudain découvert la compassion. Ils cherchent simplement à survivre politiquement. »
La “zone jaune”, entre trêve tacite et tension extrême
La fameuse “zone jaune” correspond à une bande de terrain sous contrôle israélien, partiellement sécurisée, où Tsahal mène des opérations de fouille et de neutralisation des tunnels.
Depuis la fin de la dernière phase des combats, elle est devenue le théâtre d’opérations humanitaires sous contrôle militaire.
Des bulldozers égyptiens y travaillent depuis plusieurs jours, escortés par des chars israéliens.
Selon Haaretz, le Croissant-Rouge a signalé dimanche la découverte d’un site d’ensevelissement collectif contenant des restes humains et des fragments d’uniformes israéliens. Les analyses ADN sont en cours à la base militaire de Shura, au centre du pays.
Washington et Le Caire saluent la décision israélienne
Le département d’État américain a qualifié cette autorisation de “geste humanitaire courageux”, tout en soulignant “la complexité morale d’une guerre où les terroristes utilisent les morts comme monnaie politique”.
L’Égypte, de son côté, a salué la “coopération sécuritaire exemplaire” entre Le Caire et Jérusalem, insistant sur la nécessité de “préserver la dignité des victimes”.
Selon Al-Arabiya, la coordination égyptienne-israélienne inclut un protocole d’urgence permettant d’interrompre immédiatement les fouilles en cas de tirs ou de provocation du Hamas. Jusqu’ici, la trêve tacite semble respectée.
Une ligne rouge fragile
Malgré cette accalmie, l’armée israélienne garde la main sur chaque mètre de terrain.
Le général Herzi Halevi a ordonné le déploiement de drones d’observation au-dessus des chantiers de fouille pour prévenir toute embuscade.
Tsahal redoute que le Hamas n’utilise la présence du Croissant-Rouge pour recueillir des informations ou préparer des opérations de communication.
Un responsable du ministère de la Défense résume la situation :
« Nous faisons tout pour ramener nos morts, mais nous n’oublions pas que l’ennemi n’a pas changé. »
À Jérusalem, les familles des otages saluent cette avancée tout en exprimant leur malaise. “Voir des membres du Hamas fouiller à côté de nos soldats, c’est insupportable”, a confié une mère à Channel 12. “Mais s’ils peuvent nous aider à retrouver nos enfants, nous acceptons cette humiliation.”
Entre devoir et stratégie
Cette opération illustre la dimension morale unique du conflit : Israël continue d’agir selon les principes de la dignité humaine, même face à ceux qui les ont violés.
Permettre à des représentants du Hamas de participer aux recherches, sous surveillance, c’est affirmer la primauté de la vie et du devoir — tout en démontrant la maîtrise totale du terrain par Tsahal.
Dans une guerre où la compassion est devenue un champ de bataille, Israël prouve une fois de plus que la force et l’humanité ne sont pas incompatibles — à condition de les manier avec la même précision qu’un missile guidé.
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