Un fait divers atroce secoue l’Argentine et au-delà. Trois jeunes femmes – Morena Verdi (20 ans), sa cousine Brenda del Castillo (20 ans) et Lara Gutiérrez (15 ans) – ont été attirées le 19 septembre dans une maison de la banlieue de Buenos Aires avec la promesse de 300 dollars et d’une soirée festive. Cinq jours plus tard, leurs corps mutilés étaient retrouvés enterrés dans la cour de ce que la presse locale appelle désormais la « maison de l’horreur ».
Selon les enquêteurs argentins, les victimes auraient été piégées par Tony Janzen Loverde, chef de cartel péruvien plus connu sous le surnom de Pequeño J (« J le petit »). L’homme les accusait d’avoir dérobé quatre kilos de cocaïne. Les témoignages recueillis décrivent des tortures d’une cruauté inouïe : doigts sectionnés, ongles arrachés, passages à tabac et asphyxie avec un sac en plastique. Morena aurait succombé à cette méthode, tandis que les deux autres ont été exécutées peu après.
Le plus glaçant est que ces sévices auraient été diffusés en direct sur un compte privé d’Instagram, suivi par une quarantaine de personnes. Sur l’enregistrement, on entendrait le trafiquant déclarer : « Voilà ce qui arrive à ceux qui volent ma drogue ». Si Meta, maison-mère d’Instagram, affirme n’avoir trouvé « aucune preuve » d’un tel streaming, elle assure coopérer pleinement avec les autorités judiciaires.
La découverte des corps mercredi dernier a déclenché une vague d’indignation nationale. Des milliers de manifestants se sont rassemblés devant le Parlement à Buenos Aires, scandant des slogans contre la violence faite aux femmes et brandissant les portraits des victimes. « Même aux animaux, on n’inflige pas de telles choses », s’est indigné Antonio del Castillo, grand-père de deux des jeunes femmes. Le père de Brenda a, lui, confié qu’il n’avait pas pu reconnaître sa fille tant les tortures avaient défiguré son corps.
Cinq personnes ont déjà été arrêtées, dont trois hommes et deux femmes soupçonnés d’avoir apporté une aide logistique. L’un d’entre eux a été capturé en Bolivie, près de la frontière. Mais le chef présumé, Pequeño J, reste en fuite, et un mandat d’arrêt international a été émis.
Ce triple féminicide vient rappeler la réalité tragique des violences de genre en Argentine. Selon les associations locales, une femme est assassinée toutes les 36 heures dans le pays, souvent dans un contexte de criminalité organisée ou de violences conjugales. Le mouvement féministe Ni Una Menos, qui lutte depuis 2015 contre le fléau, a dénoncé un « crime atroce qui illustre la faillite de l’État à protéger ses citoyennes ».
Au-delà de l’Argentine, ce drame soulève aussi la question de la responsabilité des plateformes numériques. Si les faits de retransmission en direct sont confirmés, Instagram serait accusé d’avoir servi de vecteur à une mise en scène macabre, rappelant d’autres précédents où des meurtres ou attentats furent diffusés en live. L’affaire pourrait alors ouvrir la voie à de nouvelles régulations, notamment en Amérique latine, où les cartels exploitent déjà réseaux sociaux et messageries cryptées pour recruter, intimider et terroriser.
Dans les rues de Buenos Aires, les proches des victimes ont organisé une marche silencieuse, ponctuée de cris de douleur et d’appels à la justice. Trois cercueils blancs, portés par des camarades de classe et des voisins, ont symbolisé une jeunesse brisée par la barbarie. « Il faut protéger les femmes plus que jamais », a lancé le père de Brenda. Une phrase qui résonne désormais comme un cri national.
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