La guerre contre le crime organisé a pris une tournure sanglante au Brésil. Au moins 64 personnes ont été tuées lors d’un raid massif des forces de sécurité dans plusieurs favelas de Rio de Janeiro, visant le puissant cartel “Comando Vermelho”. L’opération, la plus vaste jamais menée dans la ville, plonge la métropole dans le chaos.
C’est une journée qui marquera un tournant dans l’histoire de la lutte contre le narcotrafic au Brésil.
Selon les autorités locales, au moins 64 personnes ont été tuées mardi lors d’un immense raid policier mené contre le cartel du “Comando Vermelho” (l’Ordre rouge), le plus puissant groupe criminel du pays.
L’opération, qui a mobilisé plus de 2 500 policiers et soldats, a plongé Rio de Janeiro dans une atmosphère de guerre urbaine.
📰 Source : Mako News / Reuters – 29/10/2025
Une ville sous siège
Les affrontements ont éclaté à l’aube dans les favelas de Complexo do Alemão et Penha, bastions du Comando Vermelho.
Des vidéos postées sur les réseaux sociaux montrent des tirs nourris, des explosions et des nuages de fumée noire s’élevant au-dessus des bidonvilles.
Plusieurs véhicules blindés ont été incendiés, tandis que des hélicoptères survolaient la zone.
“On a entendu des rafales sans interruption pendant des heures. On aurait dit une zone de guerre”, raconte une habitante du quartier de Penha au média Globo News.
Le gouverneur de l’État de Rio, Cláudio Castro, a confirmé la mort de quatre policiers, précisant que “la majorité des victimes sont des membres de gangs lourdement armés”.
Il a qualifié l’opération de “plus grande de l’histoire de la ville”.
“Ce n’est plus du crime, c’est du terrorisme de la drogue”
L’objectif officiel : démanteler les cellules armées du Comando Vermelho, qui contrôlent la distribution de drogue, le racket et le trafic d’armes dans plusieurs quartiers de la métropole.
Selon la police, les trafiquants utilisaient des drones équipés d’explosifs pour ralentir la progression des forces de l’ordre — une première dans le pays.
“Nous ne parlons plus de criminalité ordinaire, mais d’un narco-terrorisme organisé”, a déclaré le gouverneur Castro.
“Ces groupes se comportent comme des milices paramilitaires, ils défient l’État.”
La police a saisi plus de 90 fusils automatiques, des mitrailleuses lourdes, ainsi que plus d’une demi-tonne de drogue.
Près de 80 suspects ont été arrêtés et transférés vers des prisons de haute sécurité.
La population prise au piège
Le chaos a paralysé la ville pendant plusieurs heures :
- Des dizaines d’écoles ont fermé,
- les universités ont suspendu leurs cours,
- plus de 70 bus ont été incendiés sur les grands axes de circulation.
Le réseau de transport public a été complètement désorganisé, et les habitants ont reçu l’ordre de rester chez eux.
Les hôpitaux de la région nord de Rio ont rapporté une trentaine de blessés civils, parmi lesquels des enfants touchés par des balles perdues.
“C’est l’enfer sur terre”, a témoigné une infirmière à O Globo.
“Les tirs ne s’arrêtent pas, on soigne à la chaîne.”
Condamnations internationales
La violence extrême de l’opération a provoqué une vague d’indignation internationale.
L’ONU s’est dite “profondément choquée” par le bilan humain et a appelé à une “enquête rapide et impartiale”.
Human Rights Watch a dénoncé une “politique d’extermination” visant les habitants des favelas, souvent issus de communautés noires et défavorisées.
“Ces actions rappellent les pires heures du Brésil autoritaire”, a réagi un porte-parole de HRW.
“Les forces de sécurité ne peuvent pas se transformer en armée d’occupation.”
Un contexte politique explosif
L’opération survient à quelques jours de l’ouverture du sommet mondial des maires sur le climat (C40), organisé cette année à Rio.
Selon plusieurs analystes, le gouvernement aurait voulu montrer sa fermeté face au crime organisé avant cet événement très médiatisé.
Mais pour beaucoup, cette démonstration de force risque d’avoir l’effet inverse.
“Ces raids ne détruisent pas les cartels, ils les déplacent”, explique le sociologue Luiz Flávio Sapori, expert en sécurité publique.
“Tant que les chefs resteront libres, de nouveaux soldats prendront la relève. C’est une guerre sans fin.”
Une tragédie sociale et politique
Alors que les familles des victimes pleurent leurs morts, les autorités brésiliennes se félicitent d’un “succès stratégique”.
Mais sur le terrain, la méfiance et la peur dominent.
Les associations de quartier réclament des réformes structurelles plutôt que des “bains de sang médiatiques”.
Cette opération, la plus meurtrière de l’histoire de Rio, relance le débat sur la violence d’État, la fracture raciale et la faillite du système judiciaire.
Dans une ville où près d’un quart des habitants vivent dans des favelas, la paix semble encore lointaine.






