C’est une page d’histoire qui se tourne dans l’armée israélienne. D., 67 ans, pilote de chasse et instructeur, le plus âgé encore en service actif dans l’aviation israélienne, vient de quitter l’uniforme après 49 années passées à défendre le ciel d’Israël. De la guerre du Kippour aux événements du 7 octobre, en passant par la première guerre du Liban et des décennies d’entraînement acharné, il a vu le visage de Tsahal et de son armée de l’air se transformer radicalement.
Une carrière hors du commun
D. a intégré le cursus de pilote alors qu’Israël sortait à peine de l’hécatombe de 1973. « La guerre du Kippour nous a marqués à vie », confie-t-il. Affecté à une escadrille qui avait payé le plus lourd tribut, il a connu les années sombres où, disait-on, « le missile avait plié l’aile de l’avion ». Mais il a aussi vécu l’inverse : l’écrasante supériorité aérienne israélienne durant la guerre du Liban en 1982, où l’aviation ennemie fut balayée en quelques jours.
Il a reçu ses ailes des mains du général Amos Lapidot, a volé avec Avihu Ben-Nun, servi aux côtés du futur chef d’état-major Dan Haloutz, et a étudié avec Ron Arad, le navigateur disparu en captivité, dont le sort hante encore Tsahal. « Quand il est tombé en otage, c’est toute notre génération qui a vacillé », se souvient-il.
« Une vie entière dans le cockpit »
Après des années comme pilote opérationnel, il est devenu instructeur à la base de Hatzor, puis à Hazerim, où il a formé des générations entières de jeunes pilotes. « Beaucoup de ceux que j’ai formés portent aujourd’hui des responsabilités critiques pour la sécurité de l’État », dit-il avec une fierté retenue.
Mais il n’idéalise pas le passé. Au contraire, il reconnaît qu’à ses débuts, « il y avait une culture de vol très douteuse. On volait trop bas, on se crashait dans les montagnes ou en mer Morte, et les moteurs étaient bien moins fiables qu’aujourd’hui. Les accidents d’entraînement décimaient parfois presque toute une escadrille. » Aujourd’hui, dit-il, « la technologie est incomparable, tout est plus rigoureux, mieux préparé, et même la climatisation dans les cockpits a changé la vie des pilotes. »
Transmission et humilité
Avec presque cinq décennies de service, difficile pour lui de passer le relais. Pourtant, il l’assure : « La nouvelle génération vole mieux que nous. Les besoins sont toujours les mêmes depuis la Première Guerre mondiale – la tête, le caractère, l’esprit de combat – mais la technologie a changé, et eux s’y adaptent parfaitement. »
Sa mission en tant qu’instructeur n’était pas seulement de former des pilotes, mais « des combattants de l’air », capables de tenir sous pression, d’assumer la charge de missions réelles et d’incarner la résilience israélienne.
Une mise en garde pour demain
Malgré l’émotion de son départ, D. ne se contente pas de nostalgie. Il avertit, avec gravité, contre le danger de l’autosatisfaction : « Après la guerre des Six Jours, il y a eu l’euphorie. Puis est venue la guerre d’usure. Le 7 octobre, nous avons été pris par surprise parce que nous nous étions endormis. Même après nos succès, nous ne devons pas nous enivrer. Rien n’est jamais fini au Moyen-Orient. »
C’est ce mélange d’expérience, de lucidité et d’humilité qui fait de D. une légende vivante pour l’armée de l’air israélienne. Son départ symbolise la fin d’une époque, mais aussi la continuité d’un héritage. Car dans les cockpits des F-35 qui sillonnent aujourd’hui le ciel, volent des hommes et des femmes qu’il a contribué à former, et qui portent en eux sa mémoire et son exigence.
Leçon pour les générations futures
À l’heure où certains doutent de la motivation des jeunes Israéliens, le vétéran affirme au contraire que « la jeunesse d’aujourd’hui est prête, plus disciplinée, plus performante ». Mais il rappelle que cette excellence a un prix : « Dix pour cent seulement finissent le cours de pilote. Et même après trois ans d’instruction, il faut encore deux ou trois ans avant qu’un pilote soit vraiment opérationnel. C’est un investissement colossal pour l’État, mais sans cela, Israël n’existerait pas. »
L’histoire de D. est bien plus que le portrait d’un homme : c’est celui d’Israël lui-même, de ses guerres, de ses victoires, de ses cicatrices. Une démonstration vivante que la force d’Israël ne repose pas seulement sur ses avions et ses technologies, mais sur ses hommes, leur courage et leur modestie.
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