Ce qui aurait dû rester un banal accrochage de la circulation s’est transformé en quelques minutes en une scène d’une violence verbale choquante, devenue virale sur les réseaux sociaux et symptomatique d’une inquiétante banalisation de l’antisémitisme aux États-Unis. L’incident s’est produit dans la localité de Manalapan, dans le New Jersey, lorsqu’une conductrice est entrée en collision avec le véhicule d’une famille juive. La situation a rapidement dégénéré en une tirade antisémite filmée, largement diffusée et commentée en ligne.
La conductrice impliquée, identifiée sur les réseaux sociaux comme Teresa Danshitz, a été filmée immédiatement après l’impact. Dans la vidéo, elle est entendue proférant à plusieurs reprises des insultes antisémites explicites à l’encontre des occupants de l’autre voiture, les désignant comme « des Juifs » sur un ton agressif et méprisant. Loin de chercher à apaiser la situation, elle semble au contraire provoquer délibérément la caméra, déclarant sans détour : « Je m’en fiche, filmez-moi ».
Les images montrent une scène tendue et dérangeante. La conductrice adopte une posture agressive, multiplie les gestes brusques et les regards hostiles, tout en se plaignant de douleurs physiques, évoquant des vis et des tiges métalliques dans son dos. Elle demande à son fils de rester dans le véhicule, tandis que celui-ci apparaît relativement indifférent à la scène, un détail qui a profondément choqué de nombreux internautes et alimenté le débat sur la normalisation du discours de haine dans certains environnements familiaux.
La diffusion de la vidéo a été fulgurante. En l’espace de quelques heures, elle a été visionnée des centaines de milliers de fois, suscitant une vague d’indignation. Des internautes ont tenté d’identifier la conductrice, de comprendre son parcours et d’interpeller les médias nationaux afin que l’affaire ne soit pas reléguée au rang de simple fait divers. Pour beaucoup, il ne s’agissait pas d’un dérapage isolé, mais d’un exemple frappant d’antisémitisme décomplexé, exprimé publiquement, sans retenue ni crainte apparente des conséquences.
Manalapan, NJ – woman identified as Teresa Dunsheath appears to rear end a car filled with Jewish passengers.
Watch as she goes on an antisemitic tirade: « You f*cking Jew … I don’t care tape me … he’s a Jew … he’s a Jew … » pic.twitter.com/VEMkpBeJxh
— StopAntisemitism (@StopAntisemites) December 27, 2025
Sur les images, on entend également des références à l’arrivée de la police, appelée sur les lieux après l’accident. Toutefois, l’absence d’informations officielles immédiates sur la suite donnée par les forces de l’ordre a alimenté une frustration croissante. Certains internautes ont affirmé que les propos antisémites n’avaient pas été pris avec le sérieux requis. L’un d’eux a même écrit que « la police de Manalapan n’a pas pris la défense des personnes harcelées parce qu’elles étaient juives », une accusation grave, bien qu’aucune déclaration officielle n’ait confirmé ou infirmé cette perception au moment des faits.
Le cadre juridique du New Jersey prévoit pourtant des dispositions spécifiques concernant les crimes de haine. Une infraction peut être qualifiée de crime motivé par la haine lorsqu’un acte criminel est commis, en tout ou en partie, en raison d’un préjugé envers un groupe protégé. Dans ce cas précis, deux questions centrales se posent : la collision était-elle un simple accident ou un acte intentionnel ? Et les insultes proférées dépassent-elles le seuil de la liberté d’expression pour constituer une forme de harcèlement ou de menace pénalement répréhensible ?
Les organisations juives de lutte contre l’antisémitisme ont rapidement réagi. L’organisation Stop Antisemitism a qualifié la vidéo de « portrait glaçant de l’antisémitisme en 2025 », décrivant une haine « brutale, agressive et totalement normalisée dans l’esprit de l’agresseuse ». Des responsables communautaires ont souligné le caractère particulièrement traumatisant de la scène pour les victimes, rappelant que se retrouver enfermé dans un véhicule pendant qu’une personne hurle des insultes antisémites constitue une forme d’intimidation profonde, bien au-delà de simples mots.
L’affaire s’inscrit dans un contexte plus large de recrudescence des actes antisémites aux États-Unis depuis le 7 octobre 2023. Les organisations de surveillance signalent une hausse marquée des incidents : insultes, graffitis, menaces, agressions physiques. Les espaces du quotidien — routes, commerces, écoles — deviennent des lieux potentiels de confrontation, où l’identité juive peut soudainement exposer à la haine. Les réseaux sociaux jouent un rôle ambivalent dans ce phénomène : ils permettent de documenter et de dénoncer ces actes, mais contribuent aussi à leur diffusion massive.
Dans le cas de Manalapan, l’absence de réaction publique immédiate des autorités a renforcé le sentiment d’insécurité au sein de la communauté juive locale. Pour beaucoup, la crainte est que des incidents perçus comme « mineurs » soient minimisés, ouvrant la voie à une escalade. « Ignorer les insultes aujourd’hui, c’est risquer des violences demain », avertissent plusieurs militants communautaires.
À ce stade, Teresa Danshitz n’a pas publié de déclaration publique et aucune information officielle n’a été communiquée quant à d’éventuelles poursuites. Pendant ce temps, la vidéo continue de circuler, nourrissant un débat national sur les limites de la tolérance, la responsabilité des autorités et la nécessité de répondre fermement à toute manifestation de haine.
Pour de nombreux observateurs, cet épisode illustre une réalité troublante : l’antisémitisme ne se manifeste pas seulement lors de grands événements ou de manifestations idéologiques, mais surgit parfois dans les moments les plus ordinaires de la vie quotidienne. Une simple collision automobile a suffi à révéler, en quelques secondes, une hostilité profondément enracinée — et à rappeler que la vigilance reste plus que jamais indispensable.






