Carmi Gillon accuse Netanyahu : “Boulshit, menteur, tu as incité directement”

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Trente ans après l’assassinat d’Yitzhak Rabin, le nom de Carmi Gillon refait surface comme un écho douloureux à une fracture jamais refermée. Dans un documentaire diffusé sur Keshet 12 intitulé « Bimshameret Sheli » (“Sous ma responsabilité”), l’ancien chef du Shin Bet livre une confession brute : la culpabilité, la colère et une accusation directe contre le Premier ministre en exercice, Benjamin Netanyahu. Devant les caméras, Gillon lâche sans détour : « Boulshit, menteur, je t’ai montré les images. Tu as incité directement. »

La scène est lourde de mémoire. Été 1995, quelques mois avant l’assassinat de Rabin. Le pays est déchiré par le débat autour des accords d’Oslo. À la tête de l’opposition, Benjamin Netanyahu galvanise les foules sur les places publiques, tandis que les pancartes accusant Rabin de “traître” se multiplient. Dans le documentaire, Gillon raconte avoir demandé audience auprès du chef du Likoud, avec l’aval du Premier ministre Rabin lui-même. « Je suis venu l’avertir que son discours sur la place Sion était un discours d’incitation du début à la fin, » dit-il. « Je lui ai dit qu’un homme pouvait en déduire qu’il se réjouirait de voir Rabin mort. » Selon lui, Netanyahu l’aurait écouté, promettant d’adoucir le ton. Mais, ajoute Gillon, “rien n’a changé”.

Dans ses propos, l’ancien chef du Shin Bet ne ménage pas celui qu’il accuse d’avoir laissé la haine se propager : « Il ne pourra jamais se laver les mains en disant qu’il ne savait pas. » Pour Gillon, le déchaînement verbal des années 1994-1995 n’était pas un simple climat politique : c’était une poudrière. Rabin fut assassiné le 4 novembre 1995 par Yigal Amir, un extrémiste juif opposé aux accords de paix. Ce jour-là, l’État d’Israël découvrit qu’un mot peut tuer.

Les réactions n’ont pas tardé. Les proches de Rabin à l’époque confirment cette lecture. Aliza Goren, ancienne conseillère en communication du Premier ministre, l’affirme : « Netanyahu n’a pas appelé à la violence, mais il a joué un rôle décisif dans la légitimation de la haine. » Du côté du Likoud, on dénonce une tentative “de réécrire l’histoire à des fins politiques”, soulignant que “l’assassin a agi seul, hors de toute influence politique directe”.

Mais la charge de Gillon dépasse la seule question historique. Elle vise le rapport d’Israël à sa propre mémoire et à la responsabilité de ses dirigeants. En rappelant que la société israélienne vit encore “sous les ombres du 4 novembre”, il met en garde contre la répétition d’un climat de détestation : « Aujourd’hui encore, les mêmes mots circulent, les mêmes slogans, parfois les mêmes visages. » Cette mise en garde résonne d’autant plus fort qu’elle survient dans un contexte de division politique extrême, où les réseaux sociaux prolongent la rue d’hier.

Carmi Gillon n’est pas un inconnu. Né en 1950, il rejoint le Shin Bet à 22 ans, avant d’en devenir le directeur en 1995. C’est sous sa direction que le service échoua à prévenir l’assassinat de Rabin – un traumatisme qu’il confesse avoir porté toute sa vie : dépression, prise de poids, pensées suicidaires. “Chaque matin, je pensais à la manière de me suicider”, admet-il dans le film. Une confession d’autant plus poignante qu’elle mêle la culpabilité personnelle à une colère institutionnelle : celle d’un homme convaincu que le politique a trahi le devoir moral de vigilance.

En Israël, la diffusion du documentaire a provoqué un choc. Les chaînes d’information y voient un rappel brutal de la responsabilité des élites dans le maintien du lien national. Pour la gauche, le témoignage de Gillon confirme ce que beaucoup disaient depuis trois décennies : que Rabin a été tué dans un climat d’incitation nourri par la droite nationaliste. Pour la droite, au contraire, il s’agit d’un procès à charge, qui “instrumentalise la douleur d’un homme pour frapper Netanyahu en pleine campagne politique”.

Mais au-delà du tumulte, une vérité subsiste : Israël n’a jamais cessé de débattre de ce meurtre. Trente ans plus tard, la question reste la même : la démocratie israélienne a-t-elle appris à se protéger de la haine politique ?

La dernière phrase du documentaire résonne comme un avertissement : “Ce n’est pas seulement Rabin qu’on a tué, c’est une certaine idée d’Israël.” Une idée de respect, de pluralisme et de responsabilité civique qu’une partie du pays tente encore de ressusciter. Dans un État menacé de toutes parts, le poison interne reste peut-être le plus dangereux.

 

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