C’est une affaire embarrassante pour un élu de la Knesset. Selon les révélations d’Israel Hayom, le député arabe israélien Ayman Odeh, ancien chef de la Liste unifiée, a été condamné pour 37 infractions au code de la route, parmi lesquelles conduite sans permis valide, usage du téléphone portable en conduisant et excès de vitesse. Pire encore : au moment de son interpellation, son permis de conduire avait expiré depuis plus de trois ans.
Les faits remontent à environ quatre ans, lorsque le parlementaire a été arrêté à Haïfa par une patrouille de police. La scène a été filmée par la caméra corporelle d’un agent et diffusée partiellement lors de l’audience. Devant le tribunal, Odeh a reconnu les faits dans le cadre d’un accord de plaider-coupable. Le juge lui a infligé une suspension de permis de deux mois et une amende de 1 500 shekels. Une peine légère, mais qui soulève de lourdes questions sur la conduite d’un représentant de la nation censé donner l’exemple.
Lors de l’audience, le magistrat n’a pas mâché ses mots : « Il n’est pas nécessaire de s’étendre sur la gravité d’une telle infraction. Quiconque conduit sans permis valable met en danger les usagers de la route, non seulement sur le plan sécuritaire mais aussi économique. » Et d’ajouter, toutefois, qu’il existe “une faible probabilité” qu’Odeh récidive — un commentaire qui a provoqué de nombreuses réactions au sein de l’opinion publique, compte tenu de l’historique du député.
Car le dossier d’Odeh est loin d’être anodin : 37 infractions routières enregistrées, dont certaines pour conduite sous suspension. Une accumulation qui jette une ombre sur l’image du parlementaire, déjà connu pour ses prises de position virulentes contre la politique sécuritaire israélienne. L’ironie n’a pas échappé à la presse : celui qui critique sans relâche l’“abus de pouvoir” des forces de l’ordre se retrouve pris à défaut sur la voie publique, précisément là où la loi ne tolère pas d’exceptions.
Interrogé par Israel Hayom, l’entourage d’Odeh a tenté de désamorcer la polémique : « Il s’agit d’un incident datant de quatre ans. La plupart des infractions ont été commises par des assistants et des chauffeurs au service du député, et non par lui personnellement. » Une défense qui a suscité le scepticisme. Les juristes rappellent que la responsabilité incombe toujours au titulaire du véhicule, surtout lorsqu’il s’agit d’un élu de la République.
Ce n’est pas la première fois qu’Ayman Odeh se retrouve sous les projecteurs pour de mauvaises raisons. En 2021, il avait été au centre d’une altercation verbale avec la police lors d’une manifestation à Jérusalem-Est. Plus récemment, son véhicule avait été pris pour cible par des manifestants, événement qui avait suscité la condamnation du président Herzog et relancé le débat sur la violence politique. Aujourd’hui, c’est une autre forme de “violence” qui lui est reprochée : celle d’une conduite irresponsable.
Pour une partie du public israélien, cette affaire symbolise le déclin moral d’une certaine classe politique. “Comment peut-on exiger la rigueur de l’État quand on bafoue soi-même ses lois les plus élémentaires ?”, interroge un éditorialiste du Jerusalem Post. Du côté du Likoud, certains n’ont pas manqué de pointer l’hypocrisie : “Quand Odeh prêche la légalité pour les autres, il ferait bien de s’y soumettre lui-même.”
Mais derrière le scandale médiatique, le dossier soulève un problème plus large : le comportement routier des élus israéliens, souvent exemptés de sanctions sévères. Plusieurs affaires similaires ont concerné par le passé des députés ou des maires surpris en excès de vitesse ou au téléphone au volant. L’impunité perçue alimente un sentiment d’injustice chez les citoyens ordinaires.
Ayman Odeh, qui avait bâti une partie de sa réputation sur son discours en faveur des droits civiques et de la “moralisation publique”, se retrouve désormais dans la position inverse. La route, une fois encore, devient le théâtre symbolique d’un conflit entre la parole et les actes.
Pour le juge ayant rendu sa décision, la sentence se voulait pédagogique : rappeler qu’en démocratie, nul n’est au-dessus de la loi. Le message est clair : même les conducteurs les plus puissants doivent, un jour ou l’autre, s’arrêter au feu rouge de la justice.






