Une série de requêtes judiciaires déposées récemment par des Israéliens condamnés pour espionnage au profit de l’Iran met en lumière les conditions de détention strictes imposées aux prisonniers considérés comme une menace directe à la sécurité nationale. Selon une enquête diffusée sur la radio publique israélienne, ces détenus, arrêtés par le Shin Bet pour des faits de collaboration avec un État ennemi, multiplient les recours afin d’obtenir un assouplissement notable de leur régime carcéral.
Les prisonniers concernés sont incarcérés à la prison de Damon, sur le mont Carmel, dans une aile séparée et sous un statut d’« détenus de sécurité ». Cette classification implique un régime particulièrement sévère : isolement quasi total, absence de contacts avec les autres détenus, interdiction de visites familiales, aucun appel téléphonique autorisé, et rencontres limitées exclusivement à leurs avocats, à l’intérieur même de l’établissement pénitentiaire.
Leur sortie quotidienne de cellule se limite à une heure par jour, dans une cour distincte de celle des autres prisonniers. Les autorités pénitentiaires justifient ces mesures par le risque élevé de transmission d’informations sensibles, même depuis l’intérieur des murs de la prison. Pour le Service pénitentiaire israélien, toute interaction non contrôlée représente un danger potentiel pour la sécurité de l’État.
Ces dernières semaines, toutefois, un nombre croissant de détenus a saisi les tribunaux, contestant leurs conditions d’incarcération. Les demandes portent sur plusieurs points précis. En premier lieu, les prisonniers exigent l’autorisation d’introduire davantage de livres religieux dans leurs cellules, affirmant que l’accès actuel est insuffisant et porte atteinte à leur liberté de culte. Ils réclament également une augmentation du montant autorisé pour la cantine, qu’ils jugent trop faible pour couvrir leurs besoins élémentaires.
Parmi les requêtes les plus controversées figure la demande d’autorisation de cuisiner à l’intérieur des cellules, une pratique strictement interdite pour les détenus de sécurité. Les prisonniers demandent aussi un allongement de la durée quotidienne de promenade dans la cour, estimant que l’heure actuelle est insuffisante sur le plan physique et psychologique.
L’un des détenus, Moti Maman, a même tenté de faire requalifier son statut, demandant à être reconnu comme prisonnier de droit commun plutôt que comme détenu de sécurité. Condamné à dix ans de prison pour contacts avec un agent étranger et pour être entré sur le territoire iranien, Maman soutient que les conditions qui lui sont imposées sont disproportionnées. Le tribunal a rejeté sa requête sans même examiner le fond, considérant que la gravité des faits justifiait pleinement son classement sécuritaire.
Une autre requête, particulièrement détaillée, a été déposée par un détenu affirmant que son accès à l’eau chaude avait été drastiquement restreint. Selon lui, il ne disposerait que de sept minutes par jour d’eau chaude, ce qu’il considère comme une atteinte à ses droits fondamentaux. Dans la même procédure, il a exigé l’introduction dans sa cellule d’une longue liste d’objets : stylos, feuilles de papier, matelas supplémentaire, oreiller, table, chaises, ainsi que plusieurs appareils électriques, dont une radio et un radiateur. Il a même demandé l’autorisation de recevoir du pain et une pâte à tartiner au chocolat.
Ces revendications sont accueillies avec une grande méfiance par le Service pénitentiaire israélien. Les autorités estiment que certaines requêtes peuvent servir de prétexte à la transmission indirecte d’informations sur les conditions de détention, les procédures internes ou la configuration des installations, informations susceptibles d’être exploitées par des services de renseignement étrangers. Pour cette raison, chaque demande est examinée sous l’angle du risque sécuritaire, et la majorité des recours sont rejetés sans concession.
Selon les informations publiées, des dizaines de requêtes similaires ont été déposées au cours de l’année écoulée, la plupart ayant été rejetées d’emblée par les tribunaux. Toutefois, un cas particulier retient l’attention : un détenu aurait déposé à lui seul neuf requêtes distinctes, qui doivent être examinées lors d’une audience prévue dans les prochains jours. Cette concentration exceptionnelle de recours illustre la stratégie juridique adoptée par certains détenus pour tenter d’arracher, point par point, des concessions aux autorités.
Du point de vue des services de sécurité, il ne s’agit pas seulement d’une question de confort carcéral, mais d’un enjeu stratégique. L’espionnage au profit de l’Iran est considéré en Israël comme l’une des menaces les plus graves, compte tenu de l’état de guerre indirect entre les deux pays. Les autorités redoutent que tout relâchement des conditions de détention ne crée des failles exploitables.
Cette affaire soulève également un débat plus large sur l’équilibre entre droits des détenus et impératifs de sécurité nationale. Si le droit israélien reconnaît des droits fondamentaux même aux prisonniers de sécurité, il accorde également une large marge de manœuvre aux autorités lorsqu’il s’agit de protéger des informations sensibles et de prévenir toute activité hostile depuis les prisons.
En attendant les prochaines décisions judiciaires, le message des autorités reste clair : les détenus reconnus coupables d’avoir travaillé pour un État ennemi ne bénéficieront d’aucun allègement susceptible de compromettre la sécurité d’Israël.






