La communauté juive d’Anvers peut, pour l’instant, souffler. Après une vague d’inquiétude provoquée par des informations faisant état d’un retrait imminent de la police fédérale chargée de la protection des quartiers juifs, le ministre belge de l’Intérieur Bernard Quintin a annoncé que le niveau de sécurité resterait inchangé. Une décision obtenue sous la pression politique et communautaire, dans un contexte européen marqué par une recrudescence alarmante des violences antisémites.
L’alerte avait été déclenchée la veille, lorsque des médias belges ont rapporté que la police fédérale pourrait cesser d’assurer la sécurisation des zones où résident majoritairement des familles juives à Anvers. La nouvelle a immédiatement suscité une vive réaction, tant au sein de la communauté locale que parmi les représentants politiques et les organisations juives européennes, conscientes du caractère particulièrement sensible de la situation sécuritaire.
Interpellé au Parlement par les députés Michael Freilich et Daniel Bacquelaine, le ministre de l’Intérieur a tenu à clarifier la position du gouvernement. Bernard Quintin a assuré que la protection des sites et quartiers liés à la communauté juive serait maintenue conformément aux standards actuels, qu’elle soit assurée par la police locale ou fédérale, à Anvers comme dans le reste du pays. Il a toutefois reconnu, dans un souci de transparence, que des discussions avaient bien eu lieu avec les autorités locales et les forces de police, alimentant ainsi les craintes d’un possible changement de doctrine sécuritaire.
La réaction des organisations juives ne s’est pas fait attendre. L’Union des communautés juives européennes (EJA) a salué la décision du ministre, la qualifiant de « pas nécessaire et rassurant ». Ses représentants ont rappelé que les communautés juives, en Belgique comme ailleurs en Europe, constituent des cibles privilégiées du terrorisme et de la violence idéologique, indépendamment de leur taille démographique. À Anvers, où vit l’une des plus importantes communautés juives orthodoxes d’Europe, cette réalité est vécue au quotidien.
Dans un communiqué particulièrement ferme, l’EJA a souligné que les attaques visant des Juifs à travers le monde ne relèvent pas d’événements isolés. Bruxelles, Halle, Pittsburgh, Manchester ou plus récemment l’Australie ont été cités comme autant de rappels tragiques d’une menace globale. Selon l’organisation, la violence antisémite s’inscrit dans un phénomène extrémiste structuré, qui exige une réponse coordonnée, une vigilance permanente et une détermination sans faille à tous les niveaux de gouvernement.
L’intervention du député Michael Freilich a été déterminante dans ce dossier. Lui-même membre de la communauté juive, il a insisté devant le Parlement sur une réalité dérangeante : bien que les Juifs ne représentent qu’une infime partie de la population européenne, ils sont exposés à un risque sécuritaire disproportionné, uniquement en raison de leur identité. Freilich a également rappelé que l’histoire européenne confère à cette responsabilité une dimension morale particulière. La protection proactive des Juifs n’est pas un geste symbolique, a-t-il martelé, mais une obligation politique et éthique.
Au-delà de la décision immédiate, cette affaire met en lumière un malaise plus profond. Dans de nombreux pays européens, la protection des institutions juives repose encore sur des dispositifs temporaires, réévalués en fonction des priorités budgétaires ou politiques. Or, pour les familles juives d’Anvers, la question de la sécurité n’est ni abstraite ni théorique. Elle conditionne la possibilité de vivre ouvertement en tant que Juifs, de fréquenter des écoles, des synagogues et des commerces sans crainte permanente.
L’EJA a d’ailleurs insisté sur l’importance de restaurer et de préserver la confiance. En maintenant la présence policière, le gouvernement belge envoie un signal clair : il n’y aura pas de vide sécuritaire autour des communautés vulnérables. Un message d’autant plus crucial à un moment où l’antisémitisme, sous des formes anciennes et nouvelles, gagne en visibilité et en légitimité dans certains discours publics.
Si la décision du ministre Quintin est accueillie comme une victoire, elle est aussi perçue comme un rappel sévère. La sécurité des Juifs en Europe reste fragile et dépendante d’une vigilance constante. Les organisations communautaires l’affirment sans détour : le combat contre l’antisémitisme ne se limite pas aux déclarations d’intention, il se joue sur le terrain, dans la capacité des États à protéger concrètement leurs citoyens.
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