Après treize années de fouilles, Israël s’apprête à inaugurer l’un des chantiers archéologiques les plus emblématiques de Jérusalem : la voie monumentale qui, il y a deux millénaires, reliait la piscine de Siloé, au sud de la Cité de David, au Mont du Temple. Cette rue pavée, artère principale de la Jérusalem du Second Temple, a vu passer, selon l’historien Flavius Josèphe, des millions de pèlerins juifs et étrangers venus se recueillir dans le sanctuaire. L’événement, organisé ce lundi, réunit des personnalités israéliennes de premier plan, mais aussi des invités américains prestigieux : le secrétaire d’État Marco Rubio et l’ambassadeur des États-Unis en Israël, Mike Huckabee. Leur présence souligne la portée diplomatique de cette inauguration, qui dépasse le cadre archéologique pour devenir un symbole de l’alliance judéo-américaine.
Les fouilles menées par l’Autorité israélienne des Antiquités et la fondation de la Cité de David ont permis de dégager près de 600 mètres de cette voie antique. Les archéologues rappellent que cette rue n’était pas seulement un chemin de pèlerinage : elle constituait également le centre de la vie urbaine, avec ses commerces, ses marchés et ses lieux d’échange. La richesse des trouvailles confirme cette vitalité : poids de commerce, objets usuels et surtout une collection exceptionnelle de monnaies. Parmi elles, une pièce rare découverte par une fillette de onze ans, Liel Karotokop, lors d’un atelier de tamisage de terre archéologique. Sur cette monnaie d’argent figurent les mots « Jérusalem la Sainte », attestant de son usage pour le paiement de la demi-sicle destiné aux offrandes du Temple.
Cette dimension humaine des fouilles fascine autant que l’ampleur des infrastructures mises au jour. Sous la rue, les archéologues ont découvert une canalisation antique ayant servi d’égout, mais aussi de refuge dramatique : à la veille de la destruction de Jérusalem par les Romains en l’an 70, des habitants s’y étaient cachés pour tenter d’échapper au massacre. L’archéologie raconte ainsi une double histoire, faite à la fois de gloire et de tragédie, où l’éclat de la ville sainte se mêle à son effondrement. Chaque fragment retrouvé ouvre une fenêtre sur le quotidien des pèlerins et sur la mémoire des assiégés.
L’inauguration d’aujourd’hui s’inscrit aussi dans une continuité politique. Déjà en 2019, l’ambassadeur américain de l’époque, David Friedman, avait qualifié la Cité de David de “site du patrimoine américain”, affirmant que “les valeurs qui fondent l’Amérique et inspirent l’Occident trouvent leur source ici, à Jérusalem”. La participation de Marco Rubio et de Mike Huckabee prolonge cette reconnaissance symbolique, rappelant que le lien entre Israël et les États-Unis s’ancre autant dans l’histoire biblique que dans les enjeux contemporains. Le message est limpide : Jérusalem n’est pas seulement une capitale politique, c’est aussi un héritage spirituel universel.
Pour Israël, ce projet est un double triomphe. Sur le plan scientifique, il consacre une décennie d’efforts acharnés pour révéler une artère emblématique de son histoire nationale. Sur le plan diplomatique, il confère à la Cité de David un statut de vitrine internationale, où archéologie et politique s’entremêlent. Le choix de l’inauguration à la veille des fêtes de Tichri n’est pas anodin : alors que le peuple juif célèbre la mémoire et la renaissance, cette rue antique témoigne de la permanence de son lien avec Jérusalem et le Temple.
Cette inauguration, enfin, résonne comme un avertissement à ceux qui contestent la légitimité d’Israël sur sa capitale. Les pierres de la voie des pèlerins, gravées d’histoire et mises au jour par la science moderne, parlent d’elles-mêmes. Elles rappellent qu’avant la conquête romaine, avant l’exil, Jérusalem était déjà le cœur battant du peuple juif. En invitant la communauté internationale à marcher sur ces pavés, Israël affirme que ce patrimoine n’appartient pas seulement au passé, mais qu’il éclaire l’avenir.
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