À l’approche de Roch Hachana, la tension monte en Israël autour du traditionnel pèlerinage de dizaines de milliers de hassidim de Bratslav à Ouman (Ukraine). Le conflit autour de la conscription militaire des ultra-orthodoxes s’invite jusque sur les pistes de l’aéroport Ben Gourion : Israël Porush, ancien maire d’Elad et figure influente du courant haredi, a menacé d’y mobiliser 20 000 manifestants pour paralyser le hub aérien national si une solution n’est pas trouvée.
« Si nous ne volons pas, personne ne volera », a lancé Porush sur les ondes de Kol Ha’haï. Une déclaration qui fait planer le spectre d’un blocage massif de l’aéroport international du pays, artère vitale pour des centaines de milliers de passagers à la veille des fêtes.
Le nœud du problème : la conscription
En toile de fond, un affrontement ancien : la loi sur le service militaire des haredim, en pleine renégociation à la Knesset. Des milliers de jeunes hassidim – environ 5 000 selon les estimations – se retrouvent désormais sous le coup d’interdictions de sortie du territoire en raison de leur statut d’« insoumis », alors même qu’ils avaient longtemps bénéficié d’un régime dérogatoire en tant qu’étudiants en yeshiva.
Le député Eliahou Revivo (Likoud) a tenté de proposer un compromis : ceux dont le statut religieux est en suspens pourraient exceptionnellement quitter le pays pour Roch Hachana à Ouman, avant de revenir immédiatement. Mais cette « formule Revivo » divise, y compris au sein du camp ultra-orthodoxe.
Le monde rabbinique partagé
Selon des sources citées par Maariv, les grands rabbins haredim ne souhaitent pas s’associer ouvertement au combat pour Ouman. Leur priorité reste la défense globale du principe d’exemption pour les étudiants en yeshiva, pas la protection de jeunes qui, au lieu d’étudier, choisissent de voyager en Ukraine. « S’ils veulent partir et qu’ils sont arrêtés, ce sera leur problème », confie un proche du rabbinat, prédisant que les manifestations seront « marginales ».
Autrement dit, le « mainstream » haredi se concentre sur la bataille parlementaire et laisse les pèlerins d’Ouman à leur sort, quand bien même la ferveur populaire est immense.
Une menace explosive pour l’État
La possibilité de voir des dizaines de milliers de protestataires bloquer Ben Gourion inquiète les autorités. Au-delà de la question religieuse, une telle action constituerait une atteinte directe à la sécurité nationale et à l’économie du pays, en paralysant les départs et arrivées de vols internationaux.
Comme le souligne Infos-Israel.News, « dans un contexte de guerre contre le Hamas et de tensions au nord face au Hezbollah, Israël ne peut se permettre de voir son aéroport devenir le théâtre d’une guérilla intérieure ».
Une crise révélatrice
L’affaire Ouman 2025 illustre la profondeur du fossé entre une partie du public haredi et l’État israélien. Pour les uns, le pèlerinage au tombeau de Rabbi Nahman est un devoir spirituel absolu, supérieur aux obligations civiques. Pour les autres, la priorité nationale reste la défense du pays face aux menaces existentielles.
La question n’est donc pas seulement juridique mais identitaire : jusqu’où Israël peut-il tolérer des régimes d’exception pour des groupes qui refusent le service militaire, tout en exigeant la liberté totale de leurs pratiques ?
Conclusion : Ben Gourion comme symbole
Dans ce bras de fer, l’aéroport devient le champ de bataille symbolique. Si Porush et ses partisans passent des paroles aux actes, c’est le pays entier qui sera pris en otage d’un conflit non résolu depuis des décennies. Pour Israël, cette crise rappelle une vérité incontournable : la question du service militaire des haredim n’est plus un débat théorique, mais une bombe sociale et sécuritaire à retardement.
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